Soucis inutiles
Jan 28, 2025
Notre cerveau a beaucoup de mal avec la négative. Tout le monde dit « je t’aime », il n’y a que Chimène qui dans le Cid dit à don Rodrigue : « va, je ne te hais point ». Il y a un mot que j’entends se faire cuisiner à toutes les sauces : « souci ». Chaque fois que vous allez l’utiliser, vos interlocuteurs et vous-mêmes allez vous tendre un peu, sans forcément vous en apercevoir.
- Merci !
- Pas de souci.
J’espère bien ! Pourquoi ne pas répondre « avec plaisir » ?
Ou bien ce patron qui répétait en boucle lors de sa prise de parole annuelle à ses salariés : « j’ai le souci du CA, de la marge, des collaborateurs… » Le pauvre homme se condamne à des soirées bien angoissées… Pourquoi ne pas dire « je suis attentif à », « je m’intéresse à », « je prends soin de » ?
Pour tous ceux qui ont tendance à faire du surdétail, à perdre du temps sur des améliorations marginales, ne vous « chauffez » pas en répétant que vous avez « le souci du détail » - mieux vaut parler de « sens du détail », de « travail de qualité », de « rigueur ».
Au fond, ces « soucis » répétés de manière incantatoire entretiennent en nous une méfiance vis-à-vis de l’avenir, et nous incitent à fixer notre attention sur les risques potentiels. Un peu comme ce sinistre « pour le meilleur et pour le pire » dans les vœux de mariage : on se programme une dose incompressible de difficultés, au lieu de mettre tout en œuvre pour que les problèmes n’arrivent jamais !
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