L’optimisme par défaut (suite)

May 12, 2025

En cas d’insomnie, j’ai une passion coupable : je me promène au hasard sur Wikipedia. Cette nuit je suis tombé sur une citation de Montaigne qui complète parfaitement ce que je vous racontais hier.

« À quoi nous sert cette curiosité qui consiste à imaginer à l’avance tous les malheurs de la nature humaine et de nous préparer avec tant de peine à l’encontre de ceux mêmes qui peut-être ne sont pas destinés à nous atteindre ? C’est non seulement le coup, mais le vent et le bruit qui nous frappent […]

Au contraire, le plus facile et le plus naturel serait d’en délivrer même sa pensée ? Il est certain qu’à la plupart des savants la préparation à la mort a donné plus de tourment que n’a fait la souffrance même de la mort. » 

Montaigne, Essais, Livre III, chapitre 12 « De la physionomie »

Michel de Montaigne a souffert de calculs rénaux pendant le dernier quart de sa vie. La maladie de la gravelle, extrêmement douloureuse, finira par l’emporter en 1592. A 30 ans, il perd son meilleur ami, Etienne de la Boétie, un chagrin qu’il gardera toute sa vie (« parce que c’était lui, parce que c’était moi »). Il enterra cinq de ses six filles et vécut dans un siècle marqué par des guerres civiles atroces entre protestants et catholiques. 

C’est par expérience qu’il nous conseille de ne pas rajouter aux coups du sort le vent et le bruit que nous imaginons par avance.

 

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