« Honnêtement, je n’ai pas eu le temps »

Un des adverbes qui me font le plus sourire. La personne va vous annoncer qu’elle n’a pas fait ce que vous lui aviez demandé, et elle pense arrondir les angles en montrant patte blanche (ou drapeau blanc, au choix) avec cet adverbe.

Sur le principe de « faute avouée à moitié pardonnée », le pénitent pense que vous avalerez plus facilement la pilule (ou la couleuvre, au choix de nouveau) parce qu’elle ne ment pas. Mais en fait, si elle ment : ça n’est pas qu’elle n’a pas eu le temps, c’est qu’elle ne l’a pas pris ! Elle a préféré utiliser le temps que nous avons tous pour faire autre chose. 

Pour être vraiment honnête, la personne pourrait dire par exemple : « honnêtement, j’ai préféré m’occuper du rapport pour mon boss », ou « honnêtement j’avais envie de rentrer plus tôt chez moi », ou « honnêtement, j’ai pensé que ce que tu m’as demandé n’avait aucun intérêt », ou encore plus simplement : « honnêtement j’ai oublié » !

Et une fois qu’on a donné la vraie raison, pourquoi ne pas supprimer le « honnêtement » ? Ça pourrait donner : « J’ai oublié, je te présente mes excuses, qu’est-ce que tu veux en réparation ? » C’est plus simple, et puis ça implique un dédommagement de notre part. Ou bien, toujours sans l’adverbe superflu : « J’ai préféré boucler d’abord le rapport pour mon boss, est-ce que ça te va si je t’envoie ton doc avant midi ? »

J’ai déjà eu l’occasion de vous parler de ces adverbes qui ne servent à rien d’autre qu’à compliquer notre communication, ou à masquer nos intentions. Le risque : que les personnes en face de nous déclenchent une séquence de stress. Simplifier sa communication, c’est aussi simplifier ses relations.